Il a fini par pleuvoir, mais une pluie si fine que seul le ciment dans l’allée s’en est aperçu, s’assombrissant au matin. On se demande à qui peuvent bien faire plaisir les premières ondées d’automne, inutiles aux feuilles des arbustes, d’ordinaire habituées à humer l’air nocturne et humide, autant qu’aux arbres, dont les racines profondes ne sentiront aucun changement dans leur métabolisme souterrain ; elles sont semblables à une mesure gouvernementale démagogique en faveur de telle ou telle « catégorie » et dont personne, en définitive, n’aperçoit jamais le présumé bénéfice ; elle finira, dans l’esbroufe, par s’évaporer comme la part des anges, au profit d’opportunistes champignons.

Enfin, ne perdons pas l’horizon pour autant. La pluie, même timide, reste un bienfait.

Avant de s’endormir, en mains L’homme approximatif, de Tzara (Tristan), quelques lignes seulement d’une page au hasard. Les mots claquent comme une voile au vent. À mon côté, son sommeil agité, presque intranquille. Je lis à voix douce quelques mots, elle s’apaise ; se retourne lorsque je cesse de lire, ma voix seule pour la soulager semble-t-il. On dirait alors qu’elle écoute, réfugiée dans ma lecture, sérieuse et attentive dans un sommeil pourtant devenu profond, inatteignable. Il faut, détachant les mots, se recentrer autour de l’étoile : le grain du papier et son odeur de cendre se répandent dans toute la chambre.

La paume de l’oreiller gonflée pour les absorber (les mots, le papier, les cendres, la ligature de l’œil, et toute la chambre).