Dans la bruine de nos vies parfois, un rictus, un silence. Celui-ci en dit long. C’est l’ombre imprécise d’une virgule dans le trait du jour. Aux absences parfois minuscules dans la conversation tu entends l’essentiel. Conversations avec les amis, partage de petits riens, mesure muette de l’heure qui passe. Traces du temps sur les visages, les habits fatigués qui ont à dire autant. La lumière au fond des yeux fait ce qu’elle peut. Conversation avec unetelle dans la famille pour qui la vie n’est pas tendre. Ses enfants ont des douceurs de grandes personnes quand leur joie demeure. Et les vieux au dessus du don et des fous-rires, par milliers. On exagère facilement.

La fête est passée, reste à captiver l’étendue de nos devoirs, encore un mot qui se rétrécit. Hier les gens n’ont pas eu la prétention de tout expliquer, quel bonheur. Ce n’étaient pas pour autant des petites gens, comme disent ceux qui ne les connaissent pas, dans l’ignorance même de leurs mots méprisants. Tu sais te battre ? Parce que moi je sais, j’ai appris, à force. On exagère encore. Se battre entre nous, c’est ce qu’ils veulent, au fond. Ils auraient même des armes à nous vendre. Allons marcher un peu. C’est facile, regarder autrement pour commencer ; les ombres des arbres entrent en transe, le soleil les regarde de travers. Le jazz a dû commencer comme ça, de travers entre une ville et la mer.

Et derrière le phare de la pointe d’Agon — éclat bref, éclat long — sur la grève étendue ou la vue loin se perd, un Penone anonyme a dressé vers le ciel un souhait mystérieux dans l’axe du solstice. Ou bien c’est le hasard, l’ultime coup de dés d’un vieil agitateur sans boussole apparente. Crevettes et bivalves, à première vue se taisent. Erreur ! Une famille de gravelots tricote au ras des vagues. Quoi encore ? Du vent.