Dans le réfectoire, l’homme silencieux remercie le Ciel, sans doute. Le monde extérieur se devine derrière l’exigence de la règle, tressages, entrelacements, métaphores végétales, richesses délicates de l’épure. La fenêtre est une clôture, et c’est une ouverture. Peut-être ne regarde-t-il pas dehors, réfléchi dans son monde immense où toujours il se bat, et peut-être il a peur.

 
 

Les alentours du cloître, où repose, tranquille, le lavabo, et pas grand chose d’autre en dépit des restaurations successives, sont devenus un lieu de déambulation amplifié par les ruines du vent et le temps sans usure.

Les pas étouffés des promeneurs, les roues du scooter électrique d’un infirme, les conversations au loin impénétrables des confidentes et confidents, les obturateurs silencieux des appareils photo, le pinceau ou le crayon discrets d’un amateur d’art, seuls troubles minuscules d’une circulation éphémère.

 
 
 
 
 
 
 

L’ordre du monde change, évidemment. Il arrive parfois de retrouver, intacte dans la mémoire, la silhouette de tel ou tel arbre en majesté au dessus des passantes et des passants du parc Monceau, ou du parc Montsouris. Seulement, qui s’en soucie, hormis le moineau volubile ?

Georges Duby, dans la poussière démodée d’une veille bibliothèque froissée par le vacarme, revient alors comme une vieille lubie : Cîteaux, cette graine, mourut donc, il le fallait. La coque seule en demeure aujourd’hui, qui nous émeut d’autant plus qu’elle est parfaitement vide*.

 
 
 


* Georges Duby, Saint Bernard, l’art cistercien, Champs Flammarion, 1976